Brève présentation du numéro :
Cette troisième livraison de la Revue d’Anthropologie des Connaissances se compose de cinq articles hors thèmes (varia). Mais ces articles ont en commun une méthode ethnographique fine et apportent leur contribution à l’anthropologie des connaissances par la focalisation à la fois sur les objets matériels et les pratiques. Les deux premiers articles portent sur les savoirs situés dans des activités professionnelles ; les trois derniers sur les savoirs scientifiques. On y retrouvera cependant le même souci du détail et de l’analyse empirique, de terrain.
Nous publions en français un article de Silvia Gherardi qui est sociologue du travail. Cet article décrit une méthode originale d’analyse des situations de travail par une méthodologie minutieuse de recueil des données de terrain.
C’est aussi un travail de terrain très détaillé et fouillé que présente Céline Cholez en étudiant les connaissances spatiales à partir d’une enquête de terrain auprès de chauffeurs-livreurs.
L’article de Sophie Dalle nous ramène à la question des savoirs scientifiques déjà largement abordés dans les deux numéros précédents de notre Revue. Elle examine comment les locuteurs sourds deviennent experts et médiateurs au sein d’un laboratoire de linguistique spécialisé dans l’analyse de la Langue des Signes Québécoise. Là encore un travail ethnographique permet de décortiquer la montée en expertise des locuteurs impliqués dans ces recherches.
De leur côté Michel Grossetti et Louis-Jean Boë examinent le rôle de l’instrumentation scientifique qui redéfini les objets et les méthodes de recherche, dans la genèse d’une communauté scientifique francophone dédiée à l’étude de la parole. Cette analyse permet de rendre compte des multiples enjeux de la création des connaissances et de la réorientation des thématiques de recherche. Un prochain numéro de la Revue abordera cette même question de l’instrumentation dans le développement des nanotechnologies et des nanosciences.
Finalement, Igor Babou et Joëlle Le Marec sont très attentifs au contexte institutionnel de la production et diffusion des savoirs notamment par la création de matériaux iconographiques et de communication de la science vers les non-scientifiques. Les auteurs observent l’autonomisation d’une sphère d’activités censées être des activités de « diffusion » et de communication. La production des savoirs dans les laboratoires de recherche, l’activité de diffusion, les communiqués de presse s’enlacent dans un réseau dense de relations. Les auteurs savent montrer en quoi la production de savoir ne saurait être comprise en dehors de la production matérielle, ce que prônait haut et fort notre collègue J.P. Poitou dans un texte programmatique fort publié dans le premier numéro de la Revue. Ils rejoignent ainsi tout naturellement la réflexion engagée collectivement dans nos pages sur l’anthropologie des savoirs, la production des connaissances et les conditions de leurs usages.